3 mois. C’est un peu court pour prétendre raconter une expérience qui m’amène, pour un an, en Colombie, avec Inigo ! Cela pourrait se résumer par : apprendre à être étranger, un peu perdu, un peu « à côté de la plaque », à avoir besoin de l’attention des autres.

Une découverte

Le cœur de ces premiers mois a sans doute été mon déménagement, depuis le Sanctuaire Saint Pierre Claver, symbole touristique central de Carthagène, vers le presbytère Ste Rita en quartier populaire. Je vis maintenant au pied de la colline où s’étend l’ « invasion Loma Fresca », sorte de quartier très pauvre où je déploie les projets de la Fondation Afrocaribe. Il est difficile de servir les pauvres de loin. Être proche de leur communauté me force au réalisme.

A Loma Fresca, je visite les familles, je parle avec les femmes leaders. J’observe une grande précarité face aux pluies torrentielles, aux glissements de terrain, aux bandes armées aux trafics divers, à la prostitution. Les rues sont défoncées, et les espaces interstitiels jonchés d’ordures.

La vie est dans les rues. Les enfants jouent au foot pieds-nus (quel prestige d’être français et en semi-finale de coupe du monde ! Et quelle joie de m’enseigner leur langue et leur savoir !). Les sonos poussées à bloc balancent de la musique populaire et des publicités. Les moto-taxis zigzaguent entre les ornières en claxonnant.

Mon rôle

Comme coordinateur de projet de la Fondation Afrocaribe, orientée vers l’éducation populaire, je donne l’impulsion sur la conception, la mise en œuvre, et l’évaluation des projets. Je dois aussi penser la stratégie à moyen terme. Pour le moment, nous sommes dans une phase de redémarrage (tout s’est effondré avec le COVID) et je réalise un pré-diagnostic de terrain.

Concrètement, ma journée de travail commence généralement à 7h00 – 7h30. Je travaille le matin alternativement sur la conception des projets, les budgets, les RH, la Com’, la levée de fonds, ou d’autres thématiques. A midi, avec le curé jésuite de la paroisse Ste Rita, nous allons au Sanctuaire retrouver le reste de la communauté pour déjeuner. J’en profite pour saluer mes collègues qui travaillent depuis là-bas. Vers 14h, je suis de retour à Ste Rita pour monter à Loma Fresca, ou bien en réunion (souvent virtuelle) avec les divers partenaires. L’eucharistie est à 17h. Le soleil est couché lorsque nous terminons. Mes autres points de repère quotidiens sont un temps pour la flûte traversière, et un autre pour l’oraison.

Un rêve

Je découvre beaucoup du métier que j’exerce ici. J’approfondis ma maîtrise de l’espagnol, que j’ai appris en préparant ce volontariat. Mais ce que je cherche vraiment, c’est à être dérangé par la pauvreté. J’espère apprendre à me laisser bousculer par ces pauvres, et apprendre ce que c’est que d’être au service. Enfin sans doute, étranger au milieu d’une communauté chrétienne, j’espère y redécouvrir Dieu comme je ne l’ai jamais connu.